mardi 15 juin 2010

Feu Christine Boutin, ma pire ennemie.


« Il entra dans le temple, et il se mit à chasser ceux qui vendaient, leur disant: Il est écrit: Ma maison sera une maison de prière. Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs. »

Je suis plutôt d’une nature sanguine. Je ne suis pas un disciple tranquille de la modération, qui m’a toujours semblé être beaucoup trop proche de la lâcheté intellectuelle pour être honnête. Je respecte la froideur, la distanciation, la technicité dont je suis incapable de faire preuve. Mais je méprise les tièdes. La tiédeur est le choix par défaut de la médiocrité. Je l’exècre. Les fous et les hystériques nous font au moins la faveur d’être comiques ou tragiques. Les tièdes, voilà le seul drame.

J’aime bien avoir des ennemis. J’en ai besoin même. La violence intellectuelle m’enivre. C’est une addiction. Je la recherche, je la provoque.

J’essaie d’être un ennemi loyal ; c’est plus drôle. Le combat n’est intéressant que lorsqu’il est séduisant, et je n’ai jamais éprouvé le charme de la laideur. Je regretterai toujours les duels ; à l’épée bien sur. Ca ne me dérange pas d’avoir tort, ni de perdre.

Bref, j’aimais beaucoup haïr Christine Boutin. C’était une ennemie respectable. Contrairement à tant de bigots qui se cachent derrière la religion par conscience de classe, elle semblait d’une sincérité et d’un courage rares dans ces opinions. Elles étaient fausses, dangereuses mais avaient le mérite d’être connues et assumées comme telles, et pouvaient donc être combattues frontalement.

Christine Boutin a tort sur presque tout, presque tout le temps. Je ne vais pas énumérer ici l’ensemble des sujets sur lesquels elle délire car j’aurais sans doute l’occasion de revenir sur ses positions tantôt condescendantes, tantôt criminelles mais toujours toxiques et néfastes. La lutte est amère cependant, tant Christine Boutin, à l’image de tous ces ingristes religieux imprégnés de commisération halal marketée et d’eau bénite médiatiquement casher, maquille ses prises de position d’un « humanisme » aussi bidon que sa couleur de cheveux. Comme tous les Républicains et les humanistes rationnels, Boutin prétend défendre la dignité humaine, alors qu’elle ne défend que des postures plus ou moins tirées de morceaux choisies de l’idéologie et des superstitions chrétiennes –croyances légitimes, mais qui ne sont pas des arguments rationnels et n’ont rien à faire dans un débat politique.

Pourtant l’actualité récente a mis en lumière un nouvel aspect de la personnalité de Christine Boutin : c’est une escroc.

D’un point de vue moral bien sur, ou éthique pour les yeux délicats, car « tout fut légal ». Que Christine Boutin fasse une vraie mission n’est pas le problème. En tout cas, ce n’est pas le problème majeur en l’espèce. Car Christine Boutin n’est pas n’importe quelle femme politique. C’est une moraliste et une donneuse de leçon. Non contente d’avoir la fatuité d’être exemplaire, Christine Boutin a fondé sa carrière sur les injonctions et les sentences pathétiques qu’elle s’est toujours permis de lancer à l’encontre des « comportements immoraux et/ou non-naturels ».

Il y a bien une loi naturelle cependant. Une loi logique plutôt. Une loi rationnelle en fait. Les moralistes s’avèrent toujours des escrocs, pour la simple raison que leur suffisance et leur certitude leur permettent de tout s’excuser. Guidés par une pseudo morale qui les dépasserait et par une mission qu’ils incarneraient, ils sont capables, avec une candeur obscène, d’avoir les comportements les plus cyniques et les plus indécents. Parce qu’ils considèrent qu’ils n’ont plus à répondre aux lois des hommes, les prophètes de tout acabit sont des délinquants en puissance, et le volume des leçons qu’ils assènent est proportionnel à leur propre propension à les oublier.

Paradoxalement, c’est le contraire qui s’est cette fois produit. Christine Boutin a oublié le catéchisme de Rome pour se cacher derrière les ordonnances de la République. Toucher près de 10 000 euros pour une mission à la con, en profiter pour caser dans son secrétariat quelques cadres de sa secte payés par l’Etat, cumuler 20 000 euros par mois pour solder un silence politique, tout cela n’est pas très catholique ; ce qui n’empêche certes pas de jouer au martyr. Mais c’est légal.

Bref, si Jésus chassa les marchands du Temple, la République peut bien botter le cul de Boutin. Entre autres....


PS : Spéciale dédicace à Rama Yade, donneuse de leçon s’il en est, par ailleurs coupable d’escroquerie à l’hôtellerie.

2 commentaires:

  1. "la modération, qui m’a toujours semblé être beaucoup trop proche de la lâcheté intellectuelle".

    N'est-ce pas plutôt l'intransigeance qui conduit à l'inertie intellectuelle puisqu'elle ne laisse place à aucune contradiction et donc rompt toute possibilité de dialogue?

    Or, si l'on suit notre tradition philosophique socratique, c'est bien de ce dialogue et de ces contradictions qu'est pavé le chemin menant à la Vérité...

    Pire que cela: lorsque l'intransigeance épouse la dialectique ami/ennemi, elle nous incite à cacher la vacuité de nos arguments derrière l'opposition des personnalités. Cela ne mène qu'à un semblant de dialogue, une sorte de dialogue de sourds, qui ne conduit à rien d'autre qu'à une radicalisation irrationnelle des positions des uns et des autres.
    Là encore, exit la vérité.

    Reste la qualité purement rhétorique du discours qui pourrait être affirmée comme une finalité en soit. Mais pourquoi alors ne pas abandonner l'ambition philosophico-politique pour privilégier le style?

    Le romantisme, dont tu sembles hériter la griffe, a pu se permettre tous les excès dès lors qu'il a abandonné le dessein de rendre une vision réaliste du monde. Il a préféré en promouvoir une beauté totalement subjective. C'est un parti-pris à assumer.

    Toi qui aimes les opinions tranchées, serais-tu prêt à franchir ce cap?

    La beauté des mots sans la rigueur argumentative, peut-être est-ce là trop de concessions demandées de ma part. Alors autant mettre un peu d'eau dans son vin. N'est pas le Christ qui veut ! ;)

    Ceci dit, sur le sujet en lui-même (Boutin), je suis plutôt de ton avis, mais je le dirais peut-être juste avec un peu plus de... modération.

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  2. Mais je ne parle nullement d'intransigeance. Je le dis même clairement : " ca ne me derange pas d'avoir tort. ou de perdre". En fait, cela n'était peut être pas clair, je voulais dire que justement mes opinions étaient afirmées, de manière à pouvoir être contestées, et que je n'avais aucune peine à revoir mon jugement.

    Je suis on ne peut plus d'accord avec le fait que c'est par le dialogue qu'on progresse et approche de la vérité ! Mais justement, pour dialoguer, il faut avoir des positions de départ claires. On ne peut pas dialoguer avec des gens qui ne prennent pas position.

    Je ne suis pas du tout d'accord avec le fait que l'intransigeance est le seul fait des gens sanguins. La plupart des gens utilisent la modération pour faire croire qu'ils sont ouverts au dialogue. En fait, c'est juste que bien souvent ils se protègent, cachent leurs vraies positions. On ne dialogue pas, se contente de tourner autour du pot en trouvant que cette posture est formidable. De fait, la modération peut ainsi etre tout à fait intransigeante, en fermant tout dialogue.

    Enfin, je ne suis pas du tout un adepte de la rhétorique esthétique. Les mots sont une arme, et j'essaie globalement de ne pas parler pour ne rien dire. J'échoue sans doute souvent ! ;-)

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