
Ce n'est pas la première fois que je souhaite dire tout le mal que je pense des billets que publie sur le site du Post un soi-disant journaliste nommé Bruno Roger-Petit. Il prêche d'ordinaire une sorte de credo anti-zemmourien, ce qui, à mon sens, revient à accorder un peu trop d'importance aux dires et propos d'un trublion médiatique qui n'est pas un penseur.
Tel n'est pas tout-à-fait le cas d'une journaliste que j'apprécie beaucoup pour la fraîcheur des articles qu'elle fait paraître sur le site Causeur.fr - dont on pourra dire tout ce que l'on voudra, mais dont le mérite incontestable est de proposer la lecture de tribunes d'opinion, et non de sermons bien-pensants - qui s'appelle Elisabeth Levy. J'aime beaucoup Elisabeth Levy. Je vous invite à visionner la vidéo suivante. Ce qu'elle dit de sa bibliothèque me plaît : elle y décrit une passion intime et personnelle pour la lecture, qui n'a rien à voir avec ces manières de vénération ridicules qui caractérisent, de façon générale, les bibliolâtres du boulevard Saint-Germain.
Bref, ce petit détour pour en venir au fond de mon message : Bruno Roger-Petit s'est attaqué récemment de façon grotesque à Elisabeth Levy, en essayant une fois de plus de la faire passer pour la raciste islamophobe qu'elle n'est pas, s'appuyant pour ce faire sur une réaction indignée et légitime de la journaliste à des propos stupides tenus par feu le Haut-commissaire aux solidarités actives Martin Hirsch, dont je vous livre la teneur : "la vraie intégration, c'est quand des catholiques appelleront leur enfant Mohammed"(1er juillet 2010, Canal +).
Ces déclarations, de la part de celui que l'abbé Pierre avait choisi pour successeur, sont proprement surprenantes en ceci que M. Hirsch nous démontre qu'il ne s'y connaît visiblement pas du tout en matière de religion - ou alors qu'il est une gourde, hypothèse à laquelle je ne crois pas. S'il est bien une chose qui importe aux catholiques dans le choix du prénom de leurs enfants, c'est de rattacher ce prénom à celui d'un saint reconnu par l'Eglise, qui devient dès lors la figure tutélaire censée inspirer l'âme et l'esprit du nouveau baptisé. D'où bien souvent la réception de faire-parts surprenants nous annonçant la naissance d'un "Calixte", d'un "Hilaire" ou d'une "Bertille". A ce que je sache, Mohammed, le prophète fondateur de l'Islam, n'est pas un saint reconnu par les institutions officielles de l'Eglise catholique. Il n'y a pas de représentation en marbre de Mohammed à Saint-Pierre de Rome (ce qui par ailleurs serait très dangereux, puisqu'on ne peut pas représenter le Prophète). Et je ne me suis pas renseigné, mais je doute que Mohammed fasse en ce moment l'objet d'un procès en canonisation.
Bref, que des catholiques appellent leurs enfants Mohammed, à mon avis, ne démontrera pas la réussite d'un projet de "vraie intégration" (à ce propos, qu'est ce que c'est que cette histoire de vraie / fausse intégration ? cela signifierait-il que nous subirions en ce moment les effets d'une fausse intégration ? Fadela Amara, Rama Yade, Rachida Dati, Yazid Sebeg sont-ils de faux intégrés ? leur nomination au sein du gouvernement relevait-elle de l'arnaque ? je n'ose y croire...) - elle démontrera plutôt que le catholicisme aura sombré dans une sorte d'irénisme du n'importe-quoi... ce qui, au fond, n'est pas totalement invraisemblable et risque bien de se produire.
Elisabeth Levy, pour sa part, mitraille les déclarations de M. Hirsch sous un angle de tir légèrement différent. Ce qui la choque essentiellement, ce n'est pas tant le contenu de la phrase dont j'ai fait mention que ce qu'elle sous-entend, à savoir, qu'il n'y a d'intégration possible qu'à partir du moment où les Français "de souche" (qui s'appellent les "catholiques" d'après M. Hirsch, au grand mépris tout à la fois du principe fondamental de laïcité, et en même temps des athées, des agnostiques, des protestants, des juifs et même des musulmans qui vivent en France depuis des générations...) auront adopté les us et les coutumes des immigrés venus s'installer - de plein droit - sur le territoire républicain. C'est pour Elisabeth Levy une inversion du processus d'acculturation nécessaire au maintien de la cohésion sociale, qui relève chez un grand serviteur de l'Etat passé par l'Ecole Normale Supérieure et l'ENA d'une étrange conception de la tradition républicaine.
On peut discuter du point de vue d'Elisabeth Levy, mais on ne peut pas le faire à la manière de Bruno Roger-Petit, dont les méthodes suintent à grosses gouttes une mauvaise foi des plus dérangeantes (ce qui, en matière de religion, ne manque pas de piquant).
Dans ce qu'écrit Bruno Roger-Petit, tout irrite, à commencer par le titre même de son article : "Quand Elisabeth Levy veut interdire aux catholiques d'appeler leur enfant Mohammed". Si Elisabeth Levy avait défendu cette position de censure, comme bon nombre d'internautes, j'aurais été scandalisé. Le choix du prénom des enfants relève de la libre appréciation des parents, catholiques ou non, à la condition que celui-ci ne constitue pas une nuisance au devenir social des rejetons (il me semble ainsi que le préfet de je ne sais plus quel coin avait censuré le prénom "Assedic" ou "Assédique", j'ignore l'orthographe retenue).
Le problème, c'est qu'Elisabeth Levy n'a jamais défendu cette position de censure. Elle n'a jamais souhaité interdire aux catholiques d'appeler leur enfant Mohammed, elle a simplement émis l'opinion - à mon sens tout à fait légitime - que Martin Hirsch racontait n'importe quoi, et qu'il y avait des sous-entendus consternants dans les déclarations de l'ancien Haut-commissaire.
Bruno Roger-Petit, pour ce qui le concerne, considère tout au contraire que les propos de Martin Hirsch viennent frapper "comme-de-bien-entendu" au coin du bon sens : "Pour tout personne sensée vivant dans une France républicaine, laïque, l'interprétation des propos de l'ex-Haut commissaire aux Solidarités actives (sic) coule de source. Il arrivera un jour, où, conformément à son histoire à sa tradition, la France aura réussi à intégrer les descendants de la vague d'immigration venue des pays du Maghreb. Et cet inéluctable moment venu, oui, des catholiques appelleront leurs enfants Mohamed. Naturellement. Pour la beauté du prénom. De la même façon qu'ils pourraient l'appeler Michel, Georges, Pouriah, Cuong, Youri, Jean, Toshiro, Adam, Ramsès etc." nous dit-il, sans tenir aucun compte du poids cultuel et culturel respectif de chacun des prénoms qu'il mentionne. Et vous noterez qu'à l'instar d'un Christian Vanneste, quand Bruno Roger-Petit cherche à démontrer la véracité de propositions invraisemblables, il recourt à ce fameux "théorème de l'évidence" auquel je faisais référence dans un précédent billet : "coule de source", "naturellement", etc. - j'entends déjà le doux écho des "Evidemment ! Evidemment !" qui vient me chatouiller les oreilles...
Il faudrait rappeler à M. Roger-Petit qu'il n'est pas neutre de prénommer son enfant "Mohammed", "Moïse" ou "Christian", que chacun de ces trois prénoms sont religieusement connotés, et par là même sources de tensions. On ne choisit certainement pas d'appeler son enfant "Mohammed" ou "Jésus" pour la seule "beauté" (en l'occurrence contestable) du prénom, mais on fait là acte de foi. Sauf si l'on n'est doté d'aucune culture et d'aucune mémoire, phénomène qui, je le concède, n'est pas rare - mais qui n'est pas non plus réjouissant...
La suite de l'article confine au délire paranoïaque : comme bon nombre de journalistes qui rêvent d'entrer en Résistance clandestine sur facebook et qui s'insurgent contre une menace fasciste qui n'existe plus depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, Bruno Roger-Petit traque l'Islamophobe Raciste avec un acharnement aveugle - qui fait qu'il finit par le trouver aux endroits où celui-ci ne se trouve pas du tout.
Citation : "si l'on suit bien Elisabeth Levy, appeler un enfant Mohamed c'est comme porter une burqa dans la rue. C'est une exhibition religieuse qui est, de son point de vue, insupportable, intolérable, inconcevable dans l'espace public ! Malheur à tous ceux qui portent le prénom de Mohamed, ce prénom par nature synonyme de guerre de religion, conflit de civilisations, ils sont les enfants des nouveaux envahisseurs. Elisabeth Levy les a vus, elle, une nuit où elle s'était égarée en cherchant un raccourci vers la France de 1789 qu'elle ne trouva jamais. Elle sait que le cauchemar a déjà commencé. Que faut-il faire alors ? Légiférer pour interdire à tout porteur du prénom Mohamed de sortir dans l'espace public car celui-ci est incompatible avec la France rêvée de madame Lévy ? Et édicter des peines de prison pour tous les Mohamed qui oseront exhiber dans l'espace public leur insupportable prénom qui "mine la république" ?".
Pour avoir écouté l'interview d'Elisabeth Levy à laquelle Bruno Roger-Petit fait référence, je peux vous garantir et vous assurer qu'à AUCUN moment elle ne tient les propos , ne suggère les propositions et ne file les métaphores tel que rapporté par Bruno Roger-Petit. Il invente à peu de choses près tout ce qu'il décrit. C'est que Bruno Roger-Petit est victime d'une illusion cauchemardesque qui, à en croire ce qu'on peut lire un peu partout sur la toile, frappe un grand nombre de nos concitoyens : il semble persuadé que le Parti raciste a pris possession du gouvernement français, et que les populations immigrées en provenance des terres d'Islam (celles-ci seulement d'ailleurs, va savoir pourquoi...) sont gravement menacées par toute une série de mesures fictives auxquelles nul n'a jamais songé, et qui ne vont pas sans rappeler "les pires heures de l'histoire de France" (lesquelles ? celles de la France de Vichy ? de la nuit de la Saint-Barthélémy ? des tranchées de Verdun ? élisez ce que vous voudrez, il suffit de choisir un événement qui se rapporte à quelque chose de particulièrement horrible, et vous comprendrez tout l'effroi que ne manque pas de susciter à "toute personne sensée" "comme-de-bien-entendu" l'épouvantable figure de Nicolas Sark... pardon, de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom).
Bruno Roger-Petit, pour nous persuader qu'il a raison, tente de nous démontrer par ailleurs que contrairement à Elisabeth Levy qui est méchante, raciste et islamophobe, il est de son côté une personne très gentille. Ce qu'il prouve en nous racontant qu'il a des amis très gentils qui forment un couple mixte et qui ont appelé leur enfant Mohammed. Pauvre petit Mohammed. Vivre dans la France d'Elisabeth Levy, qui n'est pas d'accord avec Martin Hirsch qui est quelqu'un de particulièrement lucide et gentil, c'est une épreuve de tous les jours ! D'autant plus que le pire est encore à redouter, comme le souligne Roger-Petit : "La seule peur des parents du petit Mohamed que je connais (et des autres aussi, croyez-moi), c'est qu'un jour, grâce au gouvernement actuel et ses relais médiatiques, cet enfant devenu grand soit considéré comme un Français pas vraiment français à cause de la couleur de sa peau et/ou de son origine géographique. Et mieux encore, parce qu'ils sont Français, républicains et catholiques, rien ne les révoltent plus que les propos d'Elisabeth Levy, l'idiote utile radiophonique du sarkozysme, parce que de leur point de vue, ce qu'elle dit n'est ni catholique, ni républicain, ni français, mais tout simplement inhumain, tribal et effrayant."
"Inhumain, tribal et effrayant"... Rien que ça. Des accusations légères et nuancées, une finesse rhétorique incontestable. Et puis toujours ce fameux théorème de l'évidence : les déclarations d'Elisabeth Levy sont "tout simplement", "naturellement", "comme-de-bien-entendu" dangereuses, racistes, islamophobes, etc. Et vous noterez que le plus infâme est encore dans des considérations qui ne sont pas du tout celles d'Elisabeth Levy mais auxquelles, comme-de-bien-entendu, sa pensée la rattache.
Au fond, ce qui me choque, c'est moins la fadeur et l'insipidité de ses propos que les procédés de ce "branquignole" de Bruno Roger-Petit, qui compose des histoires effrayantes inventées de toutes pièces pour mieux s'en dissocier par la suite, à la manière d'un Frankenstein malhonnête qui, pointant du doigt la forme monstrueuse à laquelle il vient de donner vie déclare : "Regardez comme elle est moche la créature d'Elisabeth Levy !".
Le terme de "branquignole" n'est pas le mien. Il n'est pas non plus celui d'Elisabeth Levy. Il est celui de quelqu'un qu'on ne peut certainement pas suspecter d'accointance avec la droite sarkozyste puisqu'il est celui de Didier Porte, dont je vous laisse savourer la chronique... :http://www.leblogtvnews.com/article-didier-porte-demontage-de-gueules-bruno-roger-petit-sur-le-post--43443474.html
Tel n'est pas tout-à-fait le cas d'une journaliste que j'apprécie beaucoup pour la fraîcheur des articles qu'elle fait paraître sur le site Causeur.fr - dont on pourra dire tout ce que l'on voudra, mais dont le mérite incontestable est de proposer la lecture de tribunes d'opinion, et non de sermons bien-pensants - qui s'appelle Elisabeth Levy. J'aime beaucoup Elisabeth Levy. Je vous invite à visionner la vidéo suivante. Ce qu'elle dit de sa bibliothèque me plaît : elle y décrit une passion intime et personnelle pour la lecture, qui n'a rien à voir avec ces manières de vénération ridicules qui caractérisent, de façon générale, les bibliolâtres du boulevard Saint-Germain.
Bref, ce petit détour pour en venir au fond de mon message : Bruno Roger-Petit s'est attaqué récemment de façon grotesque à Elisabeth Levy, en essayant une fois de plus de la faire passer pour la raciste islamophobe qu'elle n'est pas, s'appuyant pour ce faire sur une réaction indignée et légitime de la journaliste à des propos stupides tenus par feu le Haut-commissaire aux solidarités actives Martin Hirsch, dont je vous livre la teneur : "la vraie intégration, c'est quand des catholiques appelleront leur enfant Mohammed"(1er juillet 2010, Canal +).
Ces déclarations, de la part de celui que l'abbé Pierre avait choisi pour successeur, sont proprement surprenantes en ceci que M. Hirsch nous démontre qu'il ne s'y connaît visiblement pas du tout en matière de religion - ou alors qu'il est une gourde, hypothèse à laquelle je ne crois pas. S'il est bien une chose qui importe aux catholiques dans le choix du prénom de leurs enfants, c'est de rattacher ce prénom à celui d'un saint reconnu par l'Eglise, qui devient dès lors la figure tutélaire censée inspirer l'âme et l'esprit du nouveau baptisé. D'où bien souvent la réception de faire-parts surprenants nous annonçant la naissance d'un "Calixte", d'un "Hilaire" ou d'une "Bertille". A ce que je sache, Mohammed, le prophète fondateur de l'Islam, n'est pas un saint reconnu par les institutions officielles de l'Eglise catholique. Il n'y a pas de représentation en marbre de Mohammed à Saint-Pierre de Rome (ce qui par ailleurs serait très dangereux, puisqu'on ne peut pas représenter le Prophète). Et je ne me suis pas renseigné, mais je doute que Mohammed fasse en ce moment l'objet d'un procès en canonisation.
Bref, que des catholiques appellent leurs enfants Mohammed, à mon avis, ne démontrera pas la réussite d'un projet de "vraie intégration" (à ce propos, qu'est ce que c'est que cette histoire de vraie / fausse intégration ? cela signifierait-il que nous subirions en ce moment les effets d'une fausse intégration ? Fadela Amara, Rama Yade, Rachida Dati, Yazid Sebeg sont-ils de faux intégrés ? leur nomination au sein du gouvernement relevait-elle de l'arnaque ? je n'ose y croire...) - elle démontrera plutôt que le catholicisme aura sombré dans une sorte d'irénisme du n'importe-quoi... ce qui, au fond, n'est pas totalement invraisemblable et risque bien de se produire.
Elisabeth Levy, pour sa part, mitraille les déclarations de M. Hirsch sous un angle de tir légèrement différent. Ce qui la choque essentiellement, ce n'est pas tant le contenu de la phrase dont j'ai fait mention que ce qu'elle sous-entend, à savoir, qu'il n'y a d'intégration possible qu'à partir du moment où les Français "de souche" (qui s'appellent les "catholiques" d'après M. Hirsch, au grand mépris tout à la fois du principe fondamental de laïcité, et en même temps des athées, des agnostiques, des protestants, des juifs et même des musulmans qui vivent en France depuis des générations...) auront adopté les us et les coutumes des immigrés venus s'installer - de plein droit - sur le territoire républicain. C'est pour Elisabeth Levy une inversion du processus d'acculturation nécessaire au maintien de la cohésion sociale, qui relève chez un grand serviteur de l'Etat passé par l'Ecole Normale Supérieure et l'ENA d'une étrange conception de la tradition républicaine.
On peut discuter du point de vue d'Elisabeth Levy, mais on ne peut pas le faire à la manière de Bruno Roger-Petit, dont les méthodes suintent à grosses gouttes une mauvaise foi des plus dérangeantes (ce qui, en matière de religion, ne manque pas de piquant).
Dans ce qu'écrit Bruno Roger-Petit, tout irrite, à commencer par le titre même de son article : "Quand Elisabeth Levy veut interdire aux catholiques d'appeler leur enfant Mohammed". Si Elisabeth Levy avait défendu cette position de censure, comme bon nombre d'internautes, j'aurais été scandalisé. Le choix du prénom des enfants relève de la libre appréciation des parents, catholiques ou non, à la condition que celui-ci ne constitue pas une nuisance au devenir social des rejetons (il me semble ainsi que le préfet de je ne sais plus quel coin avait censuré le prénom "Assedic" ou "Assédique", j'ignore l'orthographe retenue).
Le problème, c'est qu'Elisabeth Levy n'a jamais défendu cette position de censure. Elle n'a jamais souhaité interdire aux catholiques d'appeler leur enfant Mohammed, elle a simplement émis l'opinion - à mon sens tout à fait légitime - que Martin Hirsch racontait n'importe quoi, et qu'il y avait des sous-entendus consternants dans les déclarations de l'ancien Haut-commissaire.
Bruno Roger-Petit, pour ce qui le concerne, considère tout au contraire que les propos de Martin Hirsch viennent frapper "comme-de-bien-entendu" au coin du bon sens : "Pour tout personne sensée vivant dans une France républicaine, laïque, l'interprétation des propos de l'ex-Haut commissaire aux Solidarités actives (sic) coule de source. Il arrivera un jour, où, conformément à son histoire à sa tradition, la France aura réussi à intégrer les descendants de la vague d'immigration venue des pays du Maghreb. Et cet inéluctable moment venu, oui, des catholiques appelleront leurs enfants Mohamed. Naturellement. Pour la beauté du prénom. De la même façon qu'ils pourraient l'appeler Michel, Georges, Pouriah, Cuong, Youri, Jean, Toshiro, Adam, Ramsès etc." nous dit-il, sans tenir aucun compte du poids cultuel et culturel respectif de chacun des prénoms qu'il mentionne. Et vous noterez qu'à l'instar d'un Christian Vanneste, quand Bruno Roger-Petit cherche à démontrer la véracité de propositions invraisemblables, il recourt à ce fameux "théorème de l'évidence" auquel je faisais référence dans un précédent billet : "coule de source", "naturellement", etc. - j'entends déjà le doux écho des "Evidemment ! Evidemment !" qui vient me chatouiller les oreilles...
Il faudrait rappeler à M. Roger-Petit qu'il n'est pas neutre de prénommer son enfant "Mohammed", "Moïse" ou "Christian", que chacun de ces trois prénoms sont religieusement connotés, et par là même sources de tensions. On ne choisit certainement pas d'appeler son enfant "Mohammed" ou "Jésus" pour la seule "beauté" (en l'occurrence contestable) du prénom, mais on fait là acte de foi. Sauf si l'on n'est doté d'aucune culture et d'aucune mémoire, phénomène qui, je le concède, n'est pas rare - mais qui n'est pas non plus réjouissant...
La suite de l'article confine au délire paranoïaque : comme bon nombre de journalistes qui rêvent d'entrer en Résistance clandestine sur facebook et qui s'insurgent contre une menace fasciste qui n'existe plus depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, Bruno Roger-Petit traque l'Islamophobe Raciste avec un acharnement aveugle - qui fait qu'il finit par le trouver aux endroits où celui-ci ne se trouve pas du tout.
Citation : "si l'on suit bien Elisabeth Levy, appeler un enfant Mohamed c'est comme porter une burqa dans la rue. C'est une exhibition religieuse qui est, de son point de vue, insupportable, intolérable, inconcevable dans l'espace public ! Malheur à tous ceux qui portent le prénom de Mohamed, ce prénom par nature synonyme de guerre de religion, conflit de civilisations, ils sont les enfants des nouveaux envahisseurs. Elisabeth Levy les a vus, elle, une nuit où elle s'était égarée en cherchant un raccourci vers la France de 1789 qu'elle ne trouva jamais. Elle sait que le cauchemar a déjà commencé. Que faut-il faire alors ? Légiférer pour interdire à tout porteur du prénom Mohamed de sortir dans l'espace public car celui-ci est incompatible avec la France rêvée de madame Lévy ? Et édicter des peines de prison pour tous les Mohamed qui oseront exhiber dans l'espace public leur insupportable prénom qui "mine la république" ?".
Pour avoir écouté l'interview d'Elisabeth Levy à laquelle Bruno Roger-Petit fait référence, je peux vous garantir et vous assurer qu'à AUCUN moment elle ne tient les propos , ne suggère les propositions et ne file les métaphores tel que rapporté par Bruno Roger-Petit. Il invente à peu de choses près tout ce qu'il décrit. C'est que Bruno Roger-Petit est victime d'une illusion cauchemardesque qui, à en croire ce qu'on peut lire un peu partout sur la toile, frappe un grand nombre de nos concitoyens : il semble persuadé que le Parti raciste a pris possession du gouvernement français, et que les populations immigrées en provenance des terres d'Islam (celles-ci seulement d'ailleurs, va savoir pourquoi...) sont gravement menacées par toute une série de mesures fictives auxquelles nul n'a jamais songé, et qui ne vont pas sans rappeler "les pires heures de l'histoire de France" (lesquelles ? celles de la France de Vichy ? de la nuit de la Saint-Barthélémy ? des tranchées de Verdun ? élisez ce que vous voudrez, il suffit de choisir un événement qui se rapporte à quelque chose de particulièrement horrible, et vous comprendrez tout l'effroi que ne manque pas de susciter à "toute personne sensée" "comme-de-bien-entendu" l'épouvantable figure de Nicolas Sark... pardon, de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom).
Bruno Roger-Petit, pour nous persuader qu'il a raison, tente de nous démontrer par ailleurs que contrairement à Elisabeth Levy qui est méchante, raciste et islamophobe, il est de son côté une personne très gentille. Ce qu'il prouve en nous racontant qu'il a des amis très gentils qui forment un couple mixte et qui ont appelé leur enfant Mohammed. Pauvre petit Mohammed. Vivre dans la France d'Elisabeth Levy, qui n'est pas d'accord avec Martin Hirsch qui est quelqu'un de particulièrement lucide et gentil, c'est une épreuve de tous les jours ! D'autant plus que le pire est encore à redouter, comme le souligne Roger-Petit : "La seule peur des parents du petit Mohamed que je connais (et des autres aussi, croyez-moi), c'est qu'un jour, grâce au gouvernement actuel et ses relais médiatiques, cet enfant devenu grand soit considéré comme un Français pas vraiment français à cause de la couleur de sa peau et/ou de son origine géographique. Et mieux encore, parce qu'ils sont Français, républicains et catholiques, rien ne les révoltent plus que les propos d'Elisabeth Levy, l'idiote utile radiophonique du sarkozysme, parce que de leur point de vue, ce qu'elle dit n'est ni catholique, ni républicain, ni français, mais tout simplement inhumain, tribal et effrayant."
"Inhumain, tribal et effrayant"... Rien que ça. Des accusations légères et nuancées, une finesse rhétorique incontestable. Et puis toujours ce fameux théorème de l'évidence : les déclarations d'Elisabeth Levy sont "tout simplement", "naturellement", "comme-de-bien-entendu" dangereuses, racistes, islamophobes, etc. Et vous noterez que le plus infâme est encore dans des considérations qui ne sont pas du tout celles d'Elisabeth Levy mais auxquelles, comme-de-bien-entendu, sa pensée la rattache.
Au fond, ce qui me choque, c'est moins la fadeur et l'insipidité de ses propos que les procédés de ce "branquignole" de Bruno Roger-Petit, qui compose des histoires effrayantes inventées de toutes pièces pour mieux s'en dissocier par la suite, à la manière d'un Frankenstein malhonnête qui, pointant du doigt la forme monstrueuse à laquelle il vient de donner vie déclare : "Regardez comme elle est moche la créature d'Elisabeth Levy !".
Le terme de "branquignole" n'est pas le mien. Il n'est pas non plus celui d'Elisabeth Levy. Il est celui de quelqu'un qu'on ne peut certainement pas suspecter d'accointance avec la droite sarkozyste puisqu'il est celui de Didier Porte, dont je vous laisse savourer la chronique... :http://www.leblogtvnews.com/article-didier-porte-demontage-de-gueules-bruno-roger-petit-sur-le-post--43443474.html
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