vendredi 9 juillet 2010

La dictature du culot

S'il est un enseignement reçu en école de commerce dont je suis sûr qu'il me servira plus tard, quelle que soit la trajectoire professionnelle que je suivrai, et dont je suis tout aussi sûr qu'il est inadmissible et scandaleux, c'est bien celui du culot.

Le culot est l'enseignement fondamental des écoles de commerce. Je ne mens pas , je n'invente rien, souvenez-vous du slogan retenu par l'Ecole des Hautes études commerciales de Jouy-en-Josas : "Apprendre à oser...".

A la différence de l'audace, qui est la qualité des personnes capables de s'affranchir des schèmes de pensée préconçus pour créer quelque chose de nouveau, le culot ne crée strictement rien qui puisse avoir un usage d'intérêt social quelconque. Il ne sert que celui qui s'en sert - autant dire qu'il ne sert pas grand-chose à quoi l'on puisse s'intéresser. Il est la négation de la prudence, de la modération et du respect des autres. Il est l'arme dont rêvait le Grand Dieu du N'Importe Quoi pour imposer au collectif - privé de toute capacité de réaction - une collection d'idées stupides et de propositions grotesques qui trouvent par l'intermédiaire du culot une possibilité d'expression que contenaient jusqu'alors les règles élémentaires de la logique et de la bienséance.

En école de commerce, la règle suivante prédomine - qui vise à ce que les étudiants pratiquent de façon régulière et prolongée des exercices de culot : "toute idée exprimée mérite qu'on la considère comme pertinente", y compris si cette idée ne veut strictement rien dire, si elle n'a aucun rapport avec le contenu du cours qui fait l'objet de la séance, si elle est fausse, archifausse et démentie par l'expérience quotidienne de tout un chacun. Seule compte l'expression d'un quelque chose, quel qu'il soit, dont la valeur intrinsèque n'est pas considérée.

Cette façon d'encourager les étudiants à la pratique du culot s'appuie par ailleurs sur un certain nombre de méthodes dont toutes les écoles de commerce semblent s'être inspirées. Il s'agit par exemple de la technique de la participation, qui procède de la façon suivante : la note trimestrielle d'un étudiant de l'Essec, pour toute matière, est constituée à hauteur de 20% par une estimation de la "participation" de ce même étudiant au déroulement du cours. Autrement dit, 20% de la note d'un Essec dépend de sa capacité à lever la main en plein cours pour poser une question dont l'intérêt n'est qu'accessoire - ou pire, à déblatérer des inepties d'un ton monocorde et prétentieux - ce qui fondamentalement présuppose une maîtrise effective et conséquente de la science du culot. Cette note de participation peut se voir facilement augmentée de quelques points précieux par l'exercice répété d'une discipline sous-jacente au culot que l'on appelle "cirage de pompes". Le culot est un passeport pour tous les pays de l'exagération, à l'inclusion de la Flagornerie, alors trêve de tergiversations et pénétrons sans crainte les contrées fabuleuses de ce nouvel El Dorado ! Larguons nos amarres et qu'aucune contrainte ne nous retienne ! Osons, compagnons d'infortune, osons féliciter tel professeur d'avoir si bien retranscrit telle page de Wikipédia sur un affreux fichier Powerpoint, osons remercier tel enseignant d'avoir bien voulu prendre 30 minutes de son cours de Théorie financière pour nous expliquer les techniques de dérivation de fonctions linéaires, osons récompenser de nos compliments obséquieux tel conférencier venu discourir à propos d'une crise financière survenue par hasard si ce n'est par erreur... Ne soyons pas gênés de nos comportements outranciers : ce sont ces comportements-là mêmes que valorise l'administration d'une école très catholique et fort peu chrétienne qui n'a que faire de la décence !

Encouragés à dire n'importe quoi, n'importe quand à n'importe qui, les étudiants d'école de commerce gagnent en culot tout ce qu'ils perdent en sens critique. Il n'est pas dit qu'il s'agisse d'un bon marché...






samedi 3 juillet 2010

Sortir le Vatican de ses Bulles.

Il est grand temps que les religions rentrent dans le droit commun.

Fut un temps en Europe où il existait, globalement, trois ordres, et trois justices. Le premier d’entre eux, le Clergé, avait sans conteste le droit et les institutions les plus aboutis, les plus rigoureux, les plus justes en somme. Tant et si bien qu’Aristocratie et Tiers État les prirent en modèles. Beaucoup ont oublié que l’Inquisition, loin d’être la caricature obscène qu’avait pu être la déviance espagnole, donnerait ses bases modernes à la justice occidentale.

A partir de 1789, cette séparation devenue obsolète s’est effondrée. Contrainte et forcée, l’Église a du abandonner ses privilèges, et ses clercs jugés comme simple citoyens. Elle ne l’a jamais accepté.

aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa *
aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa*aa*

L'impunité du clergé dans les affaires de pédophilie qui déferlent enfin sur le Vatican trahit l’un des scandales les plus ignorés des démocraties occidentales : la soustraction volontaire du clergé au droit commun, organisée par l’Église et soutenue par une grande partie des élites, catholiques ou sensibles à la pression morale des clercs.

L’Église considère qu’elle n’a pas à être jugée par des laïcs. Il suffit de se pencher quelques minutes sur le droit canon pour constater que celui-ci postule que les « serviteurs du Christ » exécutent des « fins surnaturelles » garanties par le sacrement de l’ordination, et qu’en ce sens, ils n’ont aucun compte à rendre à la justice des hommes. Cacher un cadavre, des détournements de fonds, cela n’est pas facile, même si l’Église l’a fait à de nombreuses reprises –Opus Dei, Légionnaires du Christ. En revanche, intimider des enfants, sceller leurs paroles et leur cœur par la peur et la honte étaient plus concevables, pour un temps.

Ces derniers jours, trois affaires ont montré cette puissance sournoise dont personne ne semble s’offusquer.

En Belgique, la police a perquisitionné en fanfare l’archidiocèse de Bruxelles. Rien de plus normal quand on sait que les plaintes déposées par les victimes avaient dépassé le millier. Pourtant, on a appris à l’occasion de ces perquisitions que loin d’être traitées par la justice belge, les plaintes étaient recueillies par une « commission » constituée de personnalités catholiques chargées de les examiner et de les transmettre le cas échéant au ministère public… Instituée en 2000, cette commission était le fruit d’un pacte scandaleux conclu entre l’Église et le ministère de la justice, dans le flou le plus total, prétextant le besoin de protéger l’anonymat des victimes ! Soit disant indépendante, cette commission siégeait en fait au sein de l’archidiocèse, palais dans lequel étaient entreposés les dossiers justement saisis par la police la semaine dernière ! Drôle de garantie d’anonymat et d’indépendance que de confier l’enquête aux autorités qui ont tu, protégé voire cautionné les crimes sur lesquels ils doivent rendre compte ! De fait, 500 dossiers étaient en souffrance, et depuis sa création, la commission n’a transmis qu’au compte goutte les dossiers les plus évidents. C’est d’ailleurs une association catholique de défense des victimes de pédophilie, qui a alerté les autorités, lassée de 10 ans d’obstruction et de mépris.

Dimanche dernier, Benoit XVI n’a rien trouvé de mieux à faire que de condamner la perquisition, soit disant réalisée dans des « modalités déplorables » qu’il n’a bien entendu nullement précisées puisqu’elles étaient tout à fait normales.


Deuxième affaire, en Irlande, pays dans lequel les affaires de pédophilie ont ressurgi. J’insiste sur ce mot, ressurgir ; car les affaires de pédophilie ont émergé dans les années 90, et la deuxième vague à laquelle on assiste n’est liée qu’à l’échec de l’Eglise à étouffer plus longtemps, comme en Belgique, ces affaires.

L’ensemble des enquêtes, procédures et indemnisations des victimes (15 000 enfants) va coûter près de 1.4 milliards d’euros. La semaine dernière, le gouvernement irlandais a demandé à l’Église d’en payer la moitié… On hallucine ! En quoi le contribuable irlandais devrait il verser ne serait-ce qu’un centime pour juger et dédommager les crimes couverts par l’Église ?

Troisième affaire, la plus importante, et qui n’a fait l’objet d’aucun relais en France. On sait que dans plusieurs affaires, les enquêteurs ont soupçonné très fortement que des ordres provenant du Vatican avaient coordonné, voire ordonné la dissimulation des crimes, et organisé la valse internationale des prêtres pédophiles afin de les écarter des juridictions menaçantes tout en les laissant en compagnie d’enfants. Plusieurs polices et juridictions auraient bien voulu et continuent à vouloir entendre des responsables de la Curie, y compris Benoit XVI, qui occupa nombre de postes de premier plan en tant que cardinal.

Si le Vatican et le Pape avaient une once de sincérité dans les pleurnicheries grotesques et hypocrites qu’ils ont été acculés à formuler envers les victimes des prêtres pédophiles et des obstructions de l’Eglise, ils transmettraient tous les documents que réclame la justice, et ils viendraient témoigner. Ils auraient à cœur de prouver leur innocence.

Or, rien de cela. Non seulement le Vatican ne transmet rien, mais ils accusent régulièrement police et justice de vouloir « casser » l’Eglise… Afin de ne pas se plier aux demandes qui leur sont adressé, Pape et Vatican se cachent derrière l’immunité diplomatique que leur garantie leur micro-théocratie. Étrange façon de défendre son honneur et la vérité.

Lundi dernier, la Cour suprême des États Unis était amenée à se prononcer sur l’immunité diplomatique du Vatican. En effet, la Cour d’Oregon avait levé la protection, et ouvert la voie à une convocation du Pape et de sa smala à la barre d’un tribunal. Le Vatican avait fait appel, et le gouvernement américain s’était empressé de le soutenir, en demandant à la Cour Suprême de revenir sur la décision de l’Oregon. Or, la Cour Suprême ne l’a pas fait, et a refusé de se prononcer, entérinant de fait la fin de l’immunité vaticane jusqu’à la prochaine péripétie judiciaire.

Ce que révèlent ces différentes affaires est simple : l’Église tente systématiquement de se soustraire au droit commun et de régler –c’est à dire enterrer- ses affaires elle même. Ce n’est pas la seule, toutes les religions le font, mais aucune –sauf peut être les Orthodoxes- n’ont une organisation suffisante pour le faire à cette échelle, et aucune n’a la protection assurée par le statut d’État souverain du Vatican.

Le catholicisme, toutes religions doivent enfin rentrer dans le droit commun, en tout cas en Europe ! Il n’est plus possible qu’une religion se constitue en État dans l’État, adopte ses propres règles. Personne n’a jamais rien trouvé à redire au fait que les trois principales religions bafouaient totalement les règles constitutionnelles communes à toutes les démocraties occidentales, en ne respectant ni l’égalité des sexes ni l’absence de discrimination

Voici donc quelques mesures très simples pour régler définitivement le problème :

- Supprimer le Vatican en tant qu’État.
- Confisquer l’ensemble des biens que les religions ont spolié et leur accorder un usufruit onéreux.
- Obliger l’ensemble des religions à se conformer aux principes européens fondamentaux, et leur infliger des amendes conséquentes en attendant :
- Égalité Hommes/Femmes.
- Interdiction de toute discrimination.
- Interdiction du célibat obligatoire.
- Interdiction de toute cérémonie engageant la conscience ou le corps d’un mineur.